samedi 19 avril 2014

Plat du jour N°10

Plat du jour N°10: Candide de Voltaire

Trop souvent vu en classe de lycée, en examen du Baccalauréat, étudié à l'école, Candide de Voltaire fait partie de ces oeuvres fast food de l'Education Nationale qui perd toute leur saveur à être étudiées de façon trop académique, trop médico-légale, avec la peur damocléenne d'une note à venir.
C'est pourquoi, je vous propose une relecture personnelle de cette nouvelle pour le plaisir du rire et de l'enrichissement personnel. Tout y est hilarant du nom des personnages aux détournements les plus décomplexés et parfois caustiques des philosophies du temps de Voltaire en passant par des scènes de recognitions et de résurrections dignes d'un Ponson du Terrail ou d'un Eugène Sue.

Sans la grosse artillerie railleuse et farcesque de L'Ingénu du même Voltaire, Candide use avec discernement des suggestions grivoises ( physique expérimentale et langue italienne comme transparents rideaux d'allusions bien libertines) et du chemin de randonnée de ce type de conte qui nous mène d'une utopie à une autre tout en laissant entrevoir la cruauté du monde réel.

Il faut avoir vu ce monde de pure fantaisie qu'est l'El Dorado du chapitre XVIII, avec ses cailloux d'or, ses femmes guerrières, ses moutons volants et ses académies monstrueuses. Il faut avoir lu ces descriptions apocalyptiques de Lisbonne et amères de Paris. Il faut suivre Candide et ses compagnons de voyage successifs (Pangloss, Cunégonde, Cacambo, Martin) et les êtres surprenants qu'ils croisent (l'anabaptiste, le vendeur Vandendur, le nègre de Surinam, le peuple anti-jésuite des Oreillons, les plus que risibles prétendants de Cunégonde).

Pour ceux et celles que le siècle des Lumières ne toucherait guère - ainsi que pour les autres - je recommande en dessert à cette succulente lecture l'adaptation cinématographique de Norbert Carbonnaux (célèbre pour Courte-tête et Le Temps des oeufs durs), incroyable mais très juste et libre transposition du conte à l'heure de la Seconde Guerre Mondiale et de la Guerre Froide dont certains aspects touchent encore de façon dérangeante notre époque. Un film à voir pour son casting colossal (J.P.Cassel, P. Brasseur, Dalhia Lavi,Alice Sapritch, Michel Simon, Luis Mariano, Dario Moreno, Jean Poiret, Michel Serrault, Jacqueline Maillan, Jacques Balutin, Jean Richard ou encore Louis De Funès) mais aussi pour certaines scènes qui mériteraient d'entrer dans les annales comme l'excellente scène d'éloge sous contrôle de l'oeil de Moscou du meilleur des mondes communiste par Pangloss.

Une nouvelle trop méconnue ou trop scolaire dans l'esprit de chacun à redécouvrir par la relecture et le visionnage d'un film étrangement passé sous silence. Bon appétit!


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